Les nanotechnologies dans l'alimentation
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Les nanotechnologies peuvent être définies comme l’application des connaissances scientifiques en vue de contrôler et utiliser la matière à l’échelle du nanomètre, taille à laquelle des propriétés intéressantes peuvent émerger.
Que sont les nanotechnologies ?
Les nanotechnologies peuvent être définies comme l’application des connaissances scientifiques en vue de contrôler et utiliser la matière à l’échelle du nanomètre, taille à laquelle des propriétés intéressantes peuvent émerger. Le marché mondial des nanotechnologies touche à tous les domaines de la vie courante : matériaux plus résistants, allégés, dans le secteur automobile, textile, etc.
Pourquoi utiliser cette nouvelle technologie ?
La taille nano induit de nouvelles propriétés physico-chimiques des particules et/ou des propriétés décuplées par rapport aux matériaux classiques. Cette nouvelle technologie, génératrice d’applications nouvelles, est également une source de risques potentiels pour la santé et l’environnement.
Quelles sont les applications dans le domaine alimentaire ?
Si cette technologie est utilisée dans divers domaines, son utilisation est relativement faible dans le domaine alimentaire.
S’agissant de la denrée stricto sensu, l’utilisation des nanotechnologies peut viser à obtenir une dispersion dans l’eau de substances insolubles ; à protéger de façon ciblée des molécules sensibles dans les procédés de transformation ou à libérer des composés intervenant dans la saveur ou la formation de couleurs. Les développements qui apparaissent en Europe ou dans le monde concernent essentiellement les compléments alimentaires ou les aliments fonctionnels, comme l’huile de colza enrichie aux phytostérols nanoencapsulés commercialisée avec l’allégation d’une réduction optimisée du taux de cholestérol.
Le domaine des matériaux en contact avec des aliments (emballages, surfaces de découpe, parois des réfrigérateurs, etc.) est celui dans lequel se concentre la plupart des applications déjà transposées à l’échelle commerciale : feuillets d’argile pour améliorer les propriétés mécaniques, matériaux actifs libérant des nanoparticules d’argent à effet antibactérien ou encore nanocapteurs permettant la détection de contaminations microbiennes ou d’arômes représentatifs d’une maturité du produit.
À ce jour, les applications commerciales des nanotechnologies dans l’aliment restent marginales. Aucune demande d’autorisation (hors additifs – cf. infra), obligatoire avant toute mise sur le marché d’un nouvel aliment, n’a été recensée au niveau européen.
Une présence historique mais marginale dans les aliments
Des produits à l’échelle nanométrique sont utilisés depuis de nombreuses années en Europe et en France dans les aliments courants :
la silice, additif autorisée au niveau européen, depuis des années est produite sous forme nano comme antiagglomérant ;
les nanoparticules sont présentes naturellement dans l’alimentation, comme les micelles de caséine dans le lait.
Comment leur utilisation est-elle réglementée dans les denrées alimentaires ?
Les denrées alimentaires nanoparticulaires ou contenant des nanoparticules sont considérées comme des nouveaux aliments, du fait que le procédé de production n’est pas couramment utilisé et qu’il entraîne des modifications significatives dans la structure des aliments. Ces denrées sont donc soumises aux exigences de la réglementation européenne relative aux nouveaux aliments et aux nouveaux ingrédients alimentaires (règlement (CE) n° 258/97 - remplacé par le règlement (UE) 2015/2283 en 2018). Ces denrées ne peuvent être mises sur le marché sans obtention d’une autorisation, autorisation donnée suite à une évaluation de ces denrées.
À noter : des additifs peuvent également être produits à l’échelle nanoparticulaire. Ils sont alors soumis à une réglementation spécifique (voir ci-dessous : La réglementation des additifs).
Pour les matériaux au contact des denrées alimentaires, le règlement (CE) n°1935/2004 prévoit que tous les matériaux utilisés respectent le principe d’inertie. De plus, pour les matières plastiques en contact avec les denrées, la réglementation précédente est complétée par un règlement dédié (règlement (UE) N° 10/20111) qui prévoit des exigences supplémentaires. Les constituants des plastiques - dont les constituants nano- doivent être autorisés, et des limites de migrations vers l’aliment sont fixées. Ainsi, tout composé plastique est évalué au regard de sa toxicité et de son niveau de migration par l’Agence européenne de sécurité des aliments (AESA).
Concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, le règlement (UE) n° 1669/2011 prévoit un étiquetage systématique des ingrédients nanoparticulaires dans toute l’Europe
En matière de traçabilité, et suite aux engagements du Grenelle de l’Environnement, tous les opérateurs, fabricants, importateurs ou distributeurs d’une substance à l’état nanoparticulaire doivent se déclarer annuellement quelle que soit la destination de cette substance. Un arrêté a précisé les modalités de cette déclaration qui doit s’effectuer auprès de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). L’Anses a pour ce faire créé un site Internet de déclaration : www.r-nano.fr
La réglementation française prévoit également la mise à disposition du public de certaines informations concernant l’identité et les usages de ces substances, conformément aux conclusions du Grenelle de l’Environnement.
Quelles sont les connaissances scientifiques ? Quels sont les risques connus ?
En mars 2009, l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a rendu un rapport visant à faire un inventaire des produits existants afin d’évaluer les risques sanitaires. Ce rapport souligne l’absence de pratiques commerciales en termes de nanomatériaux manufacturés en France et la faiblesse des données de fond – données sur la toxicité par voie orale et sur l’exposition – qui sont préalables à toute évaluation sanitaire.
Seules quelques études ont abordé la toxicité des nanoparticules après ingestion orale. Les résultats sont souvent discordants et ne permettent pas de conclure à un effet dose, à un effet taille ou à une relation entre les caractéristiques physico-chimiques de la particule et de la toxicité. C’est pour cela que toute évaluation de nanomatériau doit être conduite au cas par cas, en prenant considération ses propriétés spécifiques, différents de celles du matériau conventionnel correspondant.
Dans un nouvel avis datant de mai 2014, l’Anses met de nouveau en évidence la difficulté de mener des évaluations spécifiques des risques sur les nanomatériaux et préconise un meilleur encadrement réglementaire, notamment dans un but de traçabilité des nanomatériaux afin de mieux estimer l'exposition des populations et identifier les nanomatériaux sur lesquels cibler les évaluations de risque sanitaire.
L’AESA (Agence européenne de sécurité des aliments), dans une publication de mai 2011, considère qu’il est essentiel de caractériser les nanomatériaux manufacturés de façon adéquate, selon les pratiques traditionnelles d’évaluation des risques. L’agence reconnaît néanmoins les nombreuses incertitudes existantes sur les méthodologies d’essai et la disponibilité des données.
En savoir plus
La réglementation des additifs Les additifs font l’objet d’une réglementation spécifique au niveau européen. Ils ne peuvent être utilisés par l’industrie agroalimentaire qu’après l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché nationale ou européenne. Cette autorisation ne peut être délivrée par les pouvoirs publics qu’après évaluation des risques par une agence indépendante (Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) ou, en France, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)). L’objet de cette expertise est d’évaluer l’innocuité de la substance pour le consommateur. Lorsque la substance est autorisée, elle est inscrite sur une liste positive et doit faire l’objet de conditions d’emploi précises : toute substance non inscrite sur cette liste est interdite. La silice a été autorisée historiquement dans ce cadre (y compris à l’état nano). |
Le principe d’inertie Tout matériau au contact des denrées alimentaires doit être suffisamment inerte pour ne pas céder aux denrées des constituants en quantité susceptible de : présenter un danger pour la santé humaine, entraîner une modification inacceptable de la composition des denrées, entraîner une altération de leur qualité organoleptique. |
L’autorisation de mise sur le marché L’autorisation de mise sur le marché de tout nouvel aliment fait suite à une évaluation des risques très complète, notamment sur les aspects toxicologiques et nutritionnels, afin de garantir la sécurité d’emploi de l’aliment. Cette évaluation est menée par l’agence nationale de l’État membre de l’opérateur demandeur, puis par l’agence européenne (AESA) en cas de contestation des autres États membres. Cette évaluation sera réalisée directement par l’AESA à partir du 1er janvier 2018, date d’entrée en application du règlement 2015/2283. |
Voir aussi
Bisphénol A : quel risque alimentaire ?
23 janvier 2014Alimentation