GIEE Altermonts : un collectif pour mieux valoriser la production laitière
Partager la page
À Saint-Denis-sur-Coise, dans les monts du Lyonnais (Loire), quatre fermes d’élevage bovin laitier ont créé une fromagerie collective bio, Altermonts. L’objectif : mieux valoriser leur lait et développer une filière résiliente et respectueuse de l’environnement. Le GIEE a obtenu le grand prix de la démarche collective des Trophées de l’agroécologie 2022-2023.
Le groupement d'intérêt économique et environnemental (GIEE) Altermonts a été imaginé en 2015, en réponse à une question simple : comment mieux valoriser le lait issu des fermes, tout en restant fidèle à ses convictions ? L’idée d’une fromagerie collective naît dans l’esprit des neuf éleveuses et éleveurs laitiers bio, qui travaillent tous dans les monts du Lyonnais, cette région de basse montagne entre Lyon et Saint-Étienne.
« La réflexion a commencé à une époque où le bio allait très bien. Mais c’est quand ça va bien qu’il faut préparer l’avenir», se souvient Matthieu Gloria, l’un des trois associés de la ferme du Val Fleury, membre d’Altermonts. « On voulait arrêter de voir notre lait circuler dans toute la France et toute l’Europe, ce n’était pas satisfaisant pour nous. On voulait réinvestir dans le territoire, et imaginer une filière fidèle à nos convictions.»
Pendant quatre ans, l’idée de la fromagerie mûrit, nourrie par de nombreuses rencontres : les neuf agriculteurs du collectif sont, pour la plupart, engagés dans les réseaux d’agriculture paysanne, les associations locales... En novembre 2019, l’équipe lance un financement participatif, appuyé par une solide campagne de communication, qui leur permet de récolter 40 000 €. En 2020, le projet se concrétise pour de bon avec la construction de la fromagerie, en s’appuyant, entre autres, sur des aides de la politique agricole commune (LEADER*, FEADER**), de la région Auvergne-Rhône-Alpes, de l’ADEME***, mais aussi des soutiens privés.
Quatre fermes, 180 vaches, 250 hectares
En 2023, Altermonts réunit quatre fermes, neuf paysannes et paysans, environ 180 vaches laitières, pour 250 hectares de surface. La fromagerie en elle-même emploie trois salariés à temps plein. Environ 370 000 L de lait, soit un tiers de la production laitière des fermes, sont transformés chaque année en fromage (meules, tomes et raclettes). Le reste de la production laitière continue d’être collecté par leur coopérative.
Les débouchés commerciaux sont principalement les restaurants et la restauration collective des grandes villes voisines, Saint-Étienne et Lyon, mais aussi, dans une moindre mesure, les magasins bio spécialisés et la vente directe à la ferme. Pour le futur, l’objectif est clair : augmenter le volume de lait transformé pour que les exploitations puissent dégager une réelle plus-value liée à l’activité fromagère.
L’aspect économique n’est pas l’unique moteur de ce projet : les neuf paysans du GIEE partagent aussi, et surtout, de fortes convictions sur leur métier et sur le lien entre l’agriculteur et son environnement. À travers Altermonts, ils approfondissent les pratiques agroécologiques de leurs fermes : amélioration de l’autonomie fourragère, plantation de haies pour la biodiversité, utilisation de biogaz pour le camion de collecte…
« On était des collègues, on est devenus des copains »
La clé de la réussite d’un tel projet ? « Le collectif», martèle Matthieu Gloria. « On était des collègues, on est devenus des copains. Quand il y en a un qui est moins bien, les autres prennent le relais. Il faut partager les mêmes valeurs, les mêmes convictions, tout en respectant l’individualité de chacun.»
De fait, en plus de ses heures de travail à la ferme, chaque membre d’Altermonts doit prendre sa part dans le quotidien de la fromagerie : collecte du lait, hygiène et traçabilité, affinage, prospection, relations commerciales… Les rôles se répartissent en fonction des affinités de chacun. Une réunion mensuelle, avec un tour de table des fermes, permet de mettre à plat les problèmes et d’anticiper la suite. « C’est un travail humain permanent», ajoute Matthieu Gloria. «Le collectif, ça se cultive, ça ne se décrète pas du jour au lendemain. »
Parmi les moteurs de la réussite du projet, il faut aussi mentionner l’Association de formation à la gestion (AFOCG) Rhône-Loire : un animateur de cette structure, Mickaël Berthollet, accompagne le collectif depuis le départ, «un très gros soutien humain» via les formations et l’animation.
À l’occasion du Salon international de l’agriculture 2023, le jury national des Trophées de l’agroécologie a remis au GIEE Altermonts le Grand prix de la démarche collective. Le jury a salué un projet « exemplaire » par son approche collective et ses résultats économiques, environnementaux et sociaux.
* Leader (Liaison Entre Action de Développement de l'Economie Rurale) est une initiative de l'Union européenne pour soutenir des projets de développement rural lancés au niveau local afin de revitaliser les zones rurales et de créer des emplois.
** Fonds européen agricole pour le développement rural
*** Agence de la transition écologique
Voir aussi
Gautier Mazet, éleveur laitier : « Je n’imaginais pas une installation en dehors d’un collectif »
02 octobre 2023Agricultrices et agriculteurs
Jean-Pierre Barbier, éleveur : « En passant en bio, nous gagnons sur tous les plans »
08 mars 2023Production & filières
Trophées de l'agroécologie : les lauréats de l'édition 2022-2023 dévoilés lors du Salon international de l'agriculture 2023
07 mars 2023Recherche, développement et innovation