Crédit ci-après
agriculture.gouv.fr

10 décembre 2018 Actualité

Transformation numérique : « Les API, un outil pour gagner en efficacité »

Une API (Application programming interface), c'est un concept informatique au cœur de la transformation numérique des entreprises et des administrations. Sylvain Perrinel et Frédéric Bronnert, ingénieurs au ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation, animent la démarche API-AGRI (APIsation des systèmes d'information du ministère).

Ils la présentent ce 11 décembre lors des APIdays qui réunissent à Paris les spécialistes mondiaux de cet outil incontournable pour faire communiquer simplement deux systèmes d'information entre eux.

Comment définir une API ?

Sylvain Perrinel : au quotidien, dès que vous surfez sur internet, vous utilisez des API. Elles permettent par exemple de prérenseigner un formulaire, « liker » une page web, une vidéo sur les réseaux sociaux, ou gérer les publicités personnalisées qui s'affichent. Les usagers ne le perçoivent pas car par définition, une API ne propose pas d'interface graphique entre l'homme et la machine. Son objectif est d'offrir à un logiciel la possibilité d'appeler un autre logiciel pour qu'il lui fournisse du service ou de la donnée en temps réel.

C'est un peu comme une porte d'entrée alors ?

Frédéric Bronnert : c'est une porte d'accès technique aux applications et aux données internes d'une entreprise ou d'une administration. Ça marche dans les deux sens : récupérer de la donnée en entrée par exemple et fournir des données/services en sortie. L'échange se fait en toute confiance et en sécurité grâce un contrat d'interface, les clés en quelque sorte.

En quoi est-ce nouveau ?

SP : le développement de l'internet et des grandes plateformes comme Google ou Amazon a permis de standardiser les techniques. Du coup, elles sont plus simples à intégrer et l'interopérabilté des systèmes se généralise et libère de l'énergie pour créer de nouvelles possibilités.
FB : avec l'APIsation - le recours accru aux API dans les projets - on n'a plus besoin de se réinventer à chaque fois. Un exemple, nous devions, pour les besoins de plusieurs applications du ministère, récupérer le référentiel des entreprises de l'Insee, le dupliquer et l'intégrer à la base de données usagers (BDNU). Avant, cela impliquait plusieurs interventions humaines et des délais... Dorénavant, notre propre outil baptisé SIRIUS API permet aux différentes applications du ministère d'interroger en continu, via des API (DINSIC, INSEE...), les données du répertoire Sirene de l'Insee, celles du Répertoire national des associations (RNA), de la mutualité sociale agricole et de la Direction générale des finances publiques pour identifier nos usagers (entreprises, établissements, associations).

Voir le schéma SIRIUS API

À quoi ça peut servir pour une administration comme la nôtre ?

FB : premièrement, l'APIsation permet de gagner en efficacité en utilisant des ressources extérieures. Un exemple, pour rembourser les frais des enseignants qui se déplacent lors des examens de l'enseignement agricole, il faut pouvoir calculer les distances parcourues. C'est complexe et plutôt que le (re)développer nous-mêmes, on va chercher l'information sur Geoportail grâce à une API de l'IGN.
SP : le ministère est aussi producteur et propriétaire de données, de par ses missions de service public. Il peut les mettre à disposition d'autres administrations et de tout particulier ou entreprise qui pourrait créer de la valeur supplémentaire à partir de ces données. C'est la logique, notamment, de l'open-data - ouverture des données publiques non confidentielles et de l’État plateforme, dans laquelle s'inscrit notre ministère au travers du plan de transformation numérique.
L'APIsation, c'est aussi ce qui rend techniquement possible l'objectif du « Dites-le-nous une fois » dans le cadre de la dématérialisation de toutes les procédures d'ici 2022.
FB : cette idée qu'en partageant on prolonge l'action publique, c'est ce qui a été fait avec l'API IFT. Le ministère a développé une API qui sécurise le calcul de l'indicateur de fréquence de traitements (IFT) phytosanitaires. Les éditeurs privés n'ont plus qu'à l'intégrer à leurs propres solutions de gestion des exploitations agricoles sans nouveau développement et créer de la valeur pour les agriculteurs qui doivent attester la réduction de leur usage de produits phytosanitaires.
De même Alim'confiance, qui permet de connaître, autour de soi, le résultat des établissements contrôlés récemment par les services sanitaires, est une interface qui repose sur une API ouverte. Demain, rien n'empêche un développeur de créer un nouveau service innovant à partir de cette API, comme Yuka l'a fait avec Nutriscore.

Quelle approche le ministère a-t-il adopté ?

FB : deux problèmes se posaient : d'abord une complexité relative à l'ingénierie (formation, sécurité). Le ministère a investi fortement dans la transformation de l'ingénierie avec l'aide d'un financement PIA (Plan d'Investissement d'Avenir). Cela se traduit par des nouveaux outils comme un API manager, de nouvelles façons d'utiliser data.gouv.fr et son API plutôt que de verser des fichiers. On a créé une communauté, le club AP,I qui rassemble toutes les maîtrises d'oeuvre (MOE) impliquées sur des API. Il se réunit une fois par mois pour partager les problèmes et les réussites. La création de la délégation numérique à la donnée est aussi une chance car elle définit un process de gouvernance des données, qui stimule les équipes. Il y a une vraie cohérence et un lien entre APIsation et politique des données. Quelles sont les données dont on est propriétaire pour créer de la valeur, et identifier les producteurs de données ?
SP : il y a aussi un sujet systémique : il faut que les maîtrises d'ouvrage (MOA) et les MOE changent leur manière de consommer les données et pensent API quand il y a production ou consommation de données.
Demain, notre SI sera construit avec des logiciels et aussi des API. Et donc chaque métier doit avoir la capacité à concevoir des services qui ne se traduisent pas nécessairement par un site internet, une application.
C'est une autre manière de concevoir le service public.

APIdays, la grande messe mondiale des API

C'est à Paris chaque année que se tient une session du principal événement consacré aux API, notamment sous l'impulsion de Mehdi Medjaoui, entrepreneur français. Les 11 et 12 décembre 2018, les principaux spécialistes et acteurs du marché débattront des dernières technologies mais aussi réglementation, inclusion numérique, gouvernance…

Frédéric Bronnert et Sylvain Perrinel y présenteront la démarche d'APIsation du ministère. « C'est aussi une formidable opportunité de valoriser le travail des équipes motivées du ministère, tant dans les directions que dans les services informatiques. »

L’événement se décline aussi en 3 autres rendez-vous internationaux à San Francisco, Melbourne et Amsterdam.

Plus d'infos sur les APIdays