Santé animale : le rôle du Chef des services vétérinaires (CVO)
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Loïc Evain est Directeur adjoint de l’alimentation et chef des services vétérinaires ou Chief Veterinary Officer (CVO). Il explique le rôle des vétérinaires et revient sur la gestion de crise sanitaire due à une maladie animale.
En quoi consiste le rôle du CVO ?
Le CVO représente l’autorité vétérinaire nationale auprès des institutions de l’Union européenne, et auprès de l’OIE qui est l’Organisation mondiale de la santé animale. En France, cette fonction est exercée par le directeur général adjoint de l’alimentation.
Les 28 CVO de l’Union européenne se réunissent régulièrement à Bruxelles, environ tous les deux mois, pour travailler sur la réglementation, faire le point sur la situation sanitaire dans les États membres et donner des orientations à la Commission. Loïc Evain a ainsi été fortement mobilisé lors des crises de la fièvre catarrhale (FCO) et de l’influenza aviaire entre 2015 et 2017. Depuis le 13 septembre 2018, c'est la menace de la Peste Porcine Africaine (PPA) qui concentre toutes les attentions, après qu'elle a été confirmée sur des sangliers en Wallonie à quelques kilomètres de la frontière française. La coopération est très étroite avec le CVO belge et avec la Commission européenne (DG Santé), avec l'objectif pour notre pays de garder un statut indemne.
Comment sont fixées les conditions sanitaires pour maintenir les échanges commerciaux au niveau international ?
La session générale de l’OIE se tient chaque année à Paris pendant la dernière semaine de mai et réunit les CVO des 182 pays membres qui sont amenés à statuer sur les normes préparées par les diverses commissions scientifiques et techniques de l’OIE.
« Ces normes de sécurité sanitaire sont importantes pour le commerce mondial des animaux et produits animaux, notamment parce qu’elles servent de référence à l’OMC en cas de contentieux entre un pays exportateur et un pays importateur » constate Loïc Evain.
De multiples contacts bilatéraux sont organisés tout au long de l’année entre CVO, pour discuter des conditions sanitaires pour les exportations d’animaux et de produits animaux, et conclure des protocoles et des certificats. Même dans les domaines où le Code de l'OIE a produit des normes précises, il faut souvent discuter, parfois très longuement, avec nos partenaires commerciaux, pour obtenir leur application.
« J’en veux pour preuve les embargos sur la viande bovine française qui perdurent pour cause d’ESB (maladie de la vache folle) en dépit du statut favorable (risque maîtrisé) qui nous a été accordé par l’OIE depuis plus de 10 ans. C'est la même chose pour l'influenza aviaire, et nous craignons le pire si la PPA venait à gagner la France, même si le Code OIE a prévu de régionaliser les maladies animales ».
Enfin, le REMESA (réseau méditerranéen de santé animale), réunit depuis quelques années les CVO des pays du pourtour de la Méditerranée. Ce réseau qui était co-présidé en 2018 par le Maroc et la France, est un lieu privilégié de concertation sur la surveillance et la lutte contre des maladies animales prioritaires, en particulier celles qui sont exotiques pour l’UE telles que la fièvre aphteuse ou la peste des petits ruminants.
Comment sont gérées les crises sanitaires ?
Loïc Evain souligne que « la situation est toujours difficile pour les filières touchées par les crises sanitaires. » Elle l’est également pour les services de l'Etat en département et en région, comme pour les vétérinaires. Ce fut particulièrement le cas dans le Sud-ouest confronté à l'influenza, c'est aujourd'hui le cas pour la région Grand-est dans la prévention de la PPA: « La DGAL rend hommage au travail qui est fait sur le terrain pour maîtriser les risques sanitaires. Et elle n’oublie pas le rôle éminent de l’ANSES et des laboratoires départementaux d’analyse».
Il vaut toujours mieux prévenir que guérir, et il n'y a pas de bonne gouvernance sanitaire sans une place importance faite à l'organisation de la surveillance sanitaire. Celle-ci repose sur une organisation qui allie les éleveurs, les vétérinaires, et l’administration. « Deux chiffres sont assez éloquents : quand on dépense 1 euro en prévention, on économise les 4 € supplémentaires qui seraient nécessaires pour lutter contre la crise, une fois celle-ci déclarée. » souligne Monsieur Evain.
Quand une maladie animale est confirmée, le CVO a l’obligation de le notifier, à la fois à Bruxelles et à l’OIE. Cette obligation repose sur un principe assez simple : la transparence, et la confiance, pour garantir la sécurité sanitaire des échanges commerciaux. Très vite les CVO du monde entier savent que tel ou tel pays a tel ou tel problème. Nous voyons alors assez vite quels sont les pays qui respectent les normes de l’OIE, et quels sont ceux qui les ignorent ou qui les appliquent partiellement. Il faut se mettre en relation avec chacun d’entre eux et expliquer la situation, de façon aussi objective que possible, essayer de rassurer, pour limiter le préjudice commercial. C'est important pour un pays gros exportateur comme la France, mais c'est parfois très long. Et quand nous avons épuisé les arguments techniques, c’est le niveau politique qui intervient. Nous l'avons vu par exemple pour la réouverture du marché chinois au bœuf français en 2018.
A Bruxelles, fort heureusement les choses se passent mieux, la réglementation s’applique automatiquement et les restrictions aux échanges intraUE sont limitées au strict nécessaire.
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