Propositions pour un cadre national de gestion durable des sols
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2015 est l'année internationale des sols. Le CGAAER et le CGEDD ont été chargés d'élaborer une stratégie nationale de gestion durable des sols. L'objectif prioritaire est de faire le lien entre les multiples politiques sectorielles qui les concernent…
Rapport de mission interministérielle de conseil N°14135 CGAAER - CGEDD
Septembre 2015
Mots clés : Sol, stratégie, gestion durable
Enjeux
Dans le contexte actuel marqué par le changement climatique et la croissance démographique, les sols sont à la croisée des grands enjeux de la sécurité alimentaire, de l'approvisionnement en eau et de la biodiversité.
Les sols sont à l’origine des productions primaires et de matériaux, de produits biochimiques et pharmaceutiques. Ils constituent un réservoir d’une biodiversité considérable. Ils interviennent dans la quantité et la qualité des flux d’air et d’eau, dans les cycles du carbone, de l’azote et de quantité d’autres éléments comme en matière de recyclage des déchets. Ils ont un rôle de tampon à l'égard des contaminants…
La prise de conscience de l’importance des services rendus par les sols à l’homme et à la planète, ainsi que des menaces que font peser les activités humaines sur la pérennité de ces services, a certes progressé mais elle reste insuffisante.
Méthodologie
La mission interministérielle était composée de Philippe Bellec et Patrick Lavarde du CGEDD, de Laurence Lefebvre et Marie-Laurence Madignier du CGAAER.
Elle a rencontré de nombreux acteurs de la gestion des sols, parmi les pouvoirs publics, les professionnels, les organismes de recherche et de développement, les ONG, les agences d’urbanisme, les autorités communautaires… Elle a dressé l’état des lieux de la prise en compte des sols dans les politiques publiques aux niveaux international, européen et national. Elle a analysé les principaux enjeux d’une politique de gestion durable des sols en France, ainsi que les positions exprimées par les différents acteurs. Enfin, elle a proposé des objectifs prioritaires à poursuivre dans le cadre d’une stratégie nationale.
Résumé
Un état des lieux des sols en France, publié en 2011, pointe la menace que représente l’extension urbaine, principal facteur de consommation des terres et d’artificialisation des sols. La progression des zones urbanisées au profit de l’habitat, des activités économiques et des infrastructures, a été sensiblement plus rapide que la croissance démographique. Elle s’est opérée à 90 % au détriment de terres agricoles, dont pour un tiers d’entre elles des sols dotés d’excellentes potentialités agronomiques et de forte capacité de réserve en eau. Les principales autres menaces, avérées dans plusieurs territoires, potentiellement aggravées par le changement climatique comme par les modes de gestion, sont l’érosion, la baisse des teneurs en matière organique, ainsi que les contaminations ponctuelles ou diffuses.
Dans une perspective de développement durable, la concurrence de plus en plus forte qui s’exerce entre les différents usages des sols nécessite donc d’organiser les complémentarités d’usage du « sol surface », support du foncier, au mieux de l’intérêt général et à partir des services rendus. Il faut également parvenir, tant en milieu urbain qu’en milieu naturel, agricole et forestier, à préserver autant que possible la résilience et la multifonctionnalité des sols. Ils ne doivent pas devenir une source de dysfonctionnements et de nuisances : accélération du ruissellement et des transferts d’eau latéraux, impacts sur la qualité des eaux et la santé (contaminations), désordres en aval dus à l’érosion, baisse de la biodiversité, augmentation des émissions de gaz à effet de serre…
La question des sols est perçue de façon très disparate par les nombreux acteurs. S’agissant d’un bien approprié, à l’inverse de l’eau et de l’air, la notion de « patrimoine commun » fait débat. L'opportunité de légiférer en la matière est peu partagée. Mais les services écosystémiques rendus par le sol sont reconnus, ainsi que le besoin de renforcer la cohérence des différentes politiques sectorielles, aujourd’hui peu coordonnées. La nécessité de construire une vision commune au sein d’une stratégie nationale fait donc consensus.
La mission a proposé que cette stratégie s’inscrive dans la durée - dix ans avec une révision à mi-parcours - et s’articule autour d’une dizaine d’axes.
Quatre axes thématiques opérationnels (assurer le bon fonctionnement des sols agricoles, forestiers et naturels ; mieux gérer les sols urbains ; prévenir et remédier à la pollution des sols ; adapter les sols au changement climatique et renforcer leur contribution à son atténuation) seraient soutenus par cinq axes transversaux (décliner territorialement la politique des sols ; développer la recherche sur les sols ; améliorer la connaissance des sols ; former et sensibiliser à l’enjeu de la préservation des sols ; agir à l’international en faveur de la préservation des sols) ; un dernier axe portant sur la gouvernance.
Pour chacun de ces axes, la mission a formulé des objectifs et un ensemble d’actions. Il s’agit de propositions non exhaustives destinées à initier la réflexion.
Elle recommande, en conclusion, qu’à partir de la décision politique qui sera prise, le projet définitif de stratégie nationale soit construit de façon collégiale, sous le pilotage du Conseil national de la transition écologique, avant d’être approuvé à l’échelon interministériel.