24 octobre 2024 Publication

Programmes sanitaires d’élevage et vente de médicaments vétérinaires par les groupements agréés

  • Muriel Dahan (IGAS)
  • Anne Dufour (CGAAER)

La loi sur la pharmacie vétérinaire de 1975 a permis d’accorder à des groupements agréés le droit de détenir et délivrer, dans des conditions précises, des médicaments vétérinaires à leurs adhérents engagés dans un programme sanitaire d’élevage. 45 ans plus tard, le contexte sanitaire, économique et social a beaucoup évolué. Un tel dispositif est-il encore pertinent ? Si oui, doit-il être adapté ?

La Lettre du CGAAER n°188 octobre 2024 CGAAER ( conseil général de l'alimentation de l'agriculture et des espaces ruraux)

Rapport de mission interministérielle de conseil n° 22084

Avril 2023

Enjeux

Dans le contexte des négociations conduites pour aboutir à une nouvelle organisation de la délivrance de médicaments vétérinaires sans examen clinique préalable et de réduction réglementaire de l’arsenal de médicaments à visée préventive, l’accès aux médicaments vétérinaires à travers des plans sanitaires d’élevage méritait lui aussi d’être analysé. Ce besoin était d’autant plus fort que toutes les parties prenantes émettaient de multiples griefs, de façon parfois très conflictuelle, à l’encontre de ce dispositif historique. Il fallait aussi analyser les conséquences sanitaires et économiques nécessairement importantes d’une évolution des modalités de délivrance, tant pour ces groupements et leurs éleveurs que pour le maintien du maillage vétérinaire rural.

Méthodologie

La mission a mobilisé les deux corps d’inspection concernés par la pharmacie vétérinaire. Elle a été confiée à un binôme associant Muriel Dahan de l’IGAS, pharmacienne, et Anne Dufour du CGAAER, vétérinaire. Ces dernières ont étudié les documents disponibles et rencontré une cinquantaine d’acteurs : administrations, syndicats professionnels des pharmaciens, des vétérinaires et des éleveurs, organisations professionnelles diverses, organismes de recherche et groupements agréés.

Résumé

La loi de 1975 relative à la pharmacie vétérinaire visait principalement à organiser le marché du médicament vétérinaire et à supprimer le colportage. À côté des deux ayants droit « historiques » du code de la santé publique, que sont les pharmaciens et les vétérinaires, elle a autorisé certains groupements de professionnels agricoles à délivrer des médicaments à visée prophylactique. Cette solution offrait aux groupements « sérieux et organisés » une voie nouvelle d’approvisionnement pour l’amélioration sanitaire des troupeaux, conditionnée à la mise en place de programmes sanitaires d’élevage (PSE).

Ce cadre général n’a que peu évolué en quarante-cinq ans, mais l’environnement sanitaire et économique s’est transformé. La concentration des groupements agréés et l’expansion de leurs aires d’intervention a projeté les PSE sur de vastes territoires, interrogeant la notion d’adaptation aux conditions locales prévue par la loi.

Le panorama des PSE met en évidence des atouts et des faiblesses, comme en ont témoigné les personnes auditionnées. Néanmoins, en l’absence de base de données nationale sur les ventes de médicaments tenue par l’administration, les éléments chiffrés disponibles ne permettent pas toujours d’étayer suffisamment les positions.

Il a été également constaté une absence de vision commune, non seulement entre les différentes catégories d’acteurs, mais aussi au sein d’une même catégorie.

Au regard de l’intérêt d’actions collectives de prévention au bénéfice de la santé animale et de la santé humaine et environnementale, la mission écarte l’idée de suppression des PSE mais propose de les faire évoluer plus ou moins profondément en fonction de scénarios précisés. Elle préconise :

  • a minima, une simplification des PSE via des modifications administratives pour réduire la charge de travail tant de la part des demandeurs que de l’administration
  • une refonte plus complète des PSE en en modifiant la définition dans le code de la santé publique pour renforcer la part non-médicamenteuse de la prévention que mettent en avant les groupements.

Enfin, l’histoire récente a démontré le rôle primordial des vétérinaires dans la gestion des épizooties, des épidémies et des pandémies, qui impose aussi de reconsidérer la santé publique dans la perspective « Une seule santé » (One Health). Au vu de l’ensemble des questions qui se posent en matière de prévention, de santé animale et environnementale et de maîtrise du médicament, la mission suggère donc de lancer dans les meilleurs délais des travaux visant à réaffirmer le rôle de professionnel de santé pour les vétérinaires en retirant ceux-ci du champ de la directive « services ».

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