Place de la vaccination dans la lutte contre l’influenza aviaire hautement pathogène
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Le CGAAER a été chargé d’étudier les stratégies vaccinales envisageables en France pour lutter contre l’influenza aviaire hautement pathogène à l’origine de graves crises sanitaires.
Rapport de mission d’expertise et de conseil n° 21046
Juillet 2021
Mots-clés : influenza aviaire, vaccin, vaccination, crises sanitaires
Enjeux
En cinq ans, trois crises sanitaires dues à l’influenza aviaire hautement pathogène (
) ont provoqué l’abattage de 7,5 millions de volailles et généré des coûts considérables pour les professionnels et l’État, des pertes de marché à l’export, ainsi qu’une moindre attractivité pour les entreprises de la génétique.
Ce dépeuplement massif de volailles, principalement préventif, se heurtera tôt ou tard à des questions d’acceptabilité sociétale.
Enfin, même si le virus H5N8 qui a circulé en Europe en 2020-2021 présente un risque infime de transmission à l’homme, l’IAHP représente une menace de santé publique qui ne doit pas être négligée.
Devant la récurrence des introductions de virus IAHP, il est devenu nécessaire de s’interroger, avec d’autres pays européens exposés au même risque, sur l’intérêt d’une stratégie vaccinale qui viendrait compléter les mesures sanitaires. Tel est l’objet de la mission confiée au CGAAER.
Méthodologie
L’analyse de la documentation scientifique, des entretiens avec les spécialistes français et étrangers de l’IAHP et des représentants des principales firmes productrices de vaccins, ont permis à la mission d’examiner la disponibilité et les caractéristiques des vaccins ainsi que les stratégies vaccinales envisageables.
Les professionnels des filières, les autorités sanitaires françaises et FranceAgriMer, ont fourni des données sur les conséquences économiques des crises passées et ont permis l’analyse coûts/bénéfices d’une vaccination en France. La position de la Commission européenne a également été recueillie.
Résumé
Des vaccins sont disponibles pour protéger les galliformes contre les virus H5Nx du clade 2.3.4.4b circulant en Europe. Pour les palmipèdes, il faudra recourir à des vaccins de nouvelle génération encore en développement. Toute stratégie vaccinale nécessitera la conduite préalable d’essais vaccinaux chez les canards mulards (filière foie gras) et l’aboutissement des méthodes visant à différencier les animaux vaccinés de ceux infectés.
Une vaccination d’urgence (en cas de foyers dans une région) apparaît difficilement réalisable avec les « candidats vaccins » actuels. Si un plan de vaccination devait être engagé en France, la mission préconiserait une vaccination préventive (en territoire indemne) et ciblée, en priorité sur la filière palmipède dans la région du Sud-Ouest qui cumule les facteurs de risque d’IAHP. Cette vaccination serait mise en place, sans attendre en début d’automne, les années où le risque lié à l’avifaune sauvage migratrice est élevé. Sa réussite technique reposerait sur la réduction d’excrétion virale permise par le vaccin (aucun vaccin ne permettant la suppression totale de l’excrétion), sur une large couverture vaccinale, sur une surveillance post vaccinale performante et sur la stricte observance des mesures de biosécurité.
Le coût estimatif de cette vaccination apparaît sans commune mesure avec celui des crises. Toutefois les conséquences à l’export seraient dramatiques si la position des pays tiers réfractaires à la vaccination n’évoluait pas.
La mission souligne l’importance de prendre en compte simultanément des différents enjeux liés à la vaccination, dont les plus importants résident dans le maintien des capacités exportatrices des filières françaises. Il serait souhaitable que l’OIE communique sur les bénéfices potentiels d’une vaccination préventive en pays indemne, facilitant ainsi son acceptation par les pays membres. La prochaine présidence française de l’Union européenne offre l’opportunité de renforcer l’intérêt déjà signalé des États membres et de la Commission européenne (CE). Un cadre commun, base des négociations bilatérales à l’export, pourrait être élaboré par la CE. Des démarches collectives d’information pourraient être engagées auprès des pays tiers importateurs. Les principes de zonage et de compartimentation, permettant de limiter les restrictions aux exportations, pourraient également être explorés.
Enfin, la mission invite à poursuivre le travail de concertation associant tous les acteurs afin de lever les craintes des filières les plus exposées aux pertes à l’export. Ces actions devraient être engagées au plus tôt si la piste vaccinale devait être retenue.