Parangonnage sur la politique publique du loup
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Faire coexister loup et élevage : comment ce défi est-il relevé par d’autres pays en Europe ? Après avoir disparu de France, plus de 1 000 loups peuplent aujourd’hui notre territoire. Le CGAAER et l’IGEDD ont été chargés d’étudier les politiques de huit pays ou régions d’Europe.
Rapport de mission interministérielle de conseil n°22127
Juillet 2023
Enjeux
Animal protégé, le loup a réapparu en France en 1992 et sa population s’est rapidement accrue jusqu’à atteindre plus de 1000 individus aujourd’hui. Les quatre plans nationaux qui ont été mis en œuvre depuis 2004 ont permis d’accompagner cette expansion par la mise en place de mesures de protection des troupeaux. Toutefois les résultats de ces mesures sont encore fragiles malgré un coût élevé pour les finances publiques.
En vue d’élaborer le nouveau plan « loup et activités d’élevage » il s’avère nécessaire de disposer d’informations et d’éléments de comparaison actualisés sur la situation et l’approche d’autres pays européens concernés. Le CGAAER et l’IGEDD ont ainsi été chargés d’étudier les politiques publiques de huit pays ou régions d’Europe.
Méthodologie
La mission interministérielle était composée de Loïc DOMBREVAL et Christian LE COZ de l’IGEDD et de Valérie BADUEL du CGAAER. Elle a sélectionné six pays européens : l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, la Slovaquie, la Suède et la Suisse. En Espagne, la mission a ciblé les communautés autonomes des Asturies, de Castille et Léon et de Catalogne, et, en Italie, la région du Piémont.
Grâce à un important travail de collecte d’informations et de données disponibles en ligne, à l’appui des conseillers pour les affaires agricoles dans les ambassades de France, ainsi qu’à de nombreuses auditions, la mission a dégagé des enseignements utiles et formulé des recommandations. Elle a également procédé au bilan de la mise en œuvre des recommandations des précédents rapports de l’IGEDD et du CGAAER.
Résumé
Le parangonnage a montré que dans tous les pays étudiés la cohabitation ou coexistence du loup avec les activités agricoles est difficile et constitue un sujet politique.
Les mesures de protection mises en œuvre dans les différents pays sont toujours issues du triptyque « clôtures, chiens et bergers », et sont adaptées aux situations nationales ou locales.
Le parangonnage confirme que le nombre d’animaux tués ou blessés par des loups est beaucoup plus important en France qu’ailleurs mais ne permet pas de comprendre pourquoi, même si le mode d’élevage pastoral spécifique à la France et la taille et le nombre des troupeaux semblent être des facteurs déterminants. Aucun des pays ou régions étudiés ne finance, comme la France, les salaires de bergers supplémentaires pour renforcer la surveillance. Les comparaisons internationales sur le coût de la politique du loup doivent donc être opérées en retranchant cette dépense, de loin la plus importante (80% du coût des mesures de protection qui représentent l’essentiel des dépenses de la politique française).
Deux pays, l’Italie et la Slovaquie, indiquent conditionner le paiement des indemnisations à la vérification de l’efficacité des mesures de protection, mais la mission n’a pas pu vérifier la réalité de cette conditionnalité. Un pays, la Suisse, souhaite l’imposer en 2024. Aucun des pays ou régions étudiés n’a retenu le concept de « Troupeaux ne pouvant être protégés » comme la France. La Bavière a décidé très récemment de l’appliquer aux alpages, mais elle est isolée en Allemagne et contestée sur la légalité de cette disposition par le gouvernement fédéral.
Enfin, le parangonnage ne montre pas que le classement du loup en annexe V de la directive Habitats ait apporté de différence substantielle concernant les mesures d’intervention sur la population de loups par rapport au classement actuel en annexe IV dont bénéficie le loup en France.
La mission a formulé sept recommandations portant sur le suivi de la population de loups, l’adaptation des mesures de protection et l’anticipation des évolutions à opérer.