Les engrais à base de nitrate d'ammonium : le stockage et les risques d'accidents
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Retrouvez les informations sur les produits commerciaux à usage agricole fabriqués à partir du nitrate d'ammonium comme matière première.
Les produits commerciaux fabriqués à partir du nitrate d'ammonium comme matière première correspondent notamment aux engrais à usage agricole qui comprennent :
- les engrais simples à base de nitrate d'ammonium dont les principaux sont dénommés « ammonitrates » ;
- les engrais composés, qui en plus de l'azote apportent un ou deux éléments fertilisants P et/ou K et dont certains peuvent contenir du nitrate d'ammonium.
Conformément à l’article L. 255-2 du code rural et de la pêche maritime, les matières fertilisantes, adjuvants pour matières fertilisantes et les supports de cultures peuvent être mis sur le marché, importés, détenus en vue de la vente, vendus, distribués à titre gratuit ou utilisés en France, sous réserve qu’ils soient couverts par une autorisation de mise sur le marché (AMM).
Pour la mise sur le marché d'un produit de ce type en France, un dossier est à déposer par le demandeur auprès de la Direction des AMM de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) en charge de l’instruction de la demande.
L’autorisation de mise sur le marché d’une matière fertilisante, d’un adjuvant pour matières fertilisantes ou d’un support de culture est délivrée par l’Anses, à l’issue d’une évaluation qui, dans les conditions d’emploi prescrites, révèle son absence d’effet nocif sur la santé humaine, la santé animale et sur l’environnement et son efficacité, selon les cas, à l’égard des végétaux et produits végétaux ou des sols (article L. 255-7 du code rural et de la pêche).
Les risques d’accidents majeurs associés aux engrais
L’explosion d’engrais à forte teneur en nitrate d’ammonium
Le danger associé aux ammonitrates (engrais à haute teneur en azote provenant du nitrate d’ammonium) est la détonation. Cependant, le nitrate d’ammonium, même très concentré, n’est pas considéré comme un « explosif » mais seulement comme un explosif occasionnel. Une explosion ne peut survenir que dans des conditions particulières, par exemple, quand l’engrais est contaminé par des matières incompatibles. Dans ces conditions, c’est-à-dire lorsque les normes s’imposant aux engrais agricoles ne sont plus respectées, le risque de détonation se trouve fortement accru en cas d’incendie. Plus la teneur en nitrate d’ammonium diminue, plus la possibilité de faire détoner le produit en conditions dégradées diminue.
La réglementation française considère une concentration limite de 24,5% en azote, soit 70% en nitrate d’ammonium, en-dessous de laquelle le danger de détonation n’est plus pris en compte.
La décomposition auto-entretenue d’engrais composés
Les engrais composés à base de nitrates qui ne contiennent pas une forte teneur en nitrate d’ammonium ne sont pas susceptibles de détonation. Ils sont cependant, en cas d’élévation de la température, le siège d’une décomposition générant des gaz toxiques (dioxyde d’azote, acide chlorhydrique, chlore…) et, pour certains, ils peuvent présenter un phénomène de décomposition auto-entretenue (phénomène similaire à une cigarette qui se consume seule). L’examen de l’accidentologie révèle, pour ce phénomène particulièrement délicat à arrêter, une fréquence d’occurrence supérieure à la détonation.
La décomposition auto-entretenue d’engrais composés se caractérise par :
- une température d’initiation pouvant être assez faible (à partir de 130°C) ;
- une période d’induction pouvant durer plusieurs heures, sans manifestation apparente ;
- une vitesse de propagation lente (quelques dizaines de centimètres par heure) ;
- l’absence de flamme ;
- la production en quantité importante de fumées toxiques denses et lourdes ;
- un foyer difficile à localiser et à atteindre, généralement dans la masse du produit.
Suivant la composition précise de l’engrais et son mode de production, la sensibilité à la décomposition auto-entretenue varie. La réglementation européenne (directive 2003/105/CE modifiant la directive 96/82/CE concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses) reconnaît que le test appelé « test en auge » permet de considérer si un engrais est susceptible de subir ou non une décomposition auto-entretenue.
Réglementation particulière applicable aux stockages d’engrais
Les dépôts d’engrais solides à base de nitrate d’ammonium relèvent de la réglementation des installations classées (ICPE). La nomenclature des ICPE susceptibles de créer des accidents majeurs impliquant des substances dangereuses est modifiée pour tenir compte des dispositions issues de la directive n° 2012/18/UE du 4 juillet 2012, dite Seveso 3, et du règlement (CE) n° 1272/2008 du 16 décembre 2008 relatif à la classification, l’emballage et l’étiquetage des substances et des mélanges. Les dénominations des classes, catégories et mentions de danger créées par ce règlement sont introduites dans le code de l’environnement. La directive définit aussi les quantités « seuils seveso » de substances ou mélanges dangereux qui peuvent être à l’origine d’accidents majeurs ou qui présentent des dangers particulièrement importants pour la sécurité et la santé des populations ou pour l’environnement. Dans ce cadre, le décret n° 2014-285 du 3 mars 2014 a mis à jour la rubrique des installations classées applicable à ce type de dépôts.
Ce texte conduit à distinguer les engrais en fonction de leur potentiel de danger. Ainsi, sont différenciés les engrais à base de nitrate d’ammonium présentant un risque de décomposition auto-entretenue, ceux présentant un risque de détonation et ceux ne présentant aucun des deux risques mentionnés ci-dessus. En ce qui concerne les engrais azotés simples et les engrais composés azotés binaires (NP ou NK) ou tertiaires (NPK), ne sont à prendre en compte que les engrais à base de nitrates (ex. ammonitrates). Les engrais azotés non à base de nitrates (ex. urée) ne sont donc pas comptabilisés.
L’identification d’un engrais à base de nitrates peut se faire par la mention de l’azote nitrique dans les documents commerciaux.
La rubrique 4702 définit les quantités seuil haut ainsi que les quantités seuil bas
NC . Non Concerné
DC . Déclaration avec Contrôles périodiques
A. Autorisation
SB. Seveso Seuil Bas
SH. Seveso Seuil Haut
Enfin, il convient de noter que l’arrêté ministériel du 13 avril 2010 relatif à la prévention des risques présentés par les stockages d’engrais solides à base de nitrate d’ammonium soumis à autorisation au titre de la rubrique 4702 et les stockages de produits soumis à autorisation au titre de la rubrique 4703 s’applique depuis sa publication (Journal Officiel n° 122 du 29 mai 2015) aux installations nouvelles et existantes de stockage relevant du régime de l’autorisation.
Les installations classées soumises à déclaration sous la rubrique 4702 sont soumises aux dispositions de l’annexe I de l’arrêté ministériel du 6 juillet 2006 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées soumises à déclaration sous la rubrique 4702.
Contrôle des installations classées
Les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) sont chargées, sous l’autorité des préfets de départements et pour le compte du ministère en charge de l’Écologie, des missions de police environnementale auprès des établissements industriels et agricoles. Ces missions de service public, définies par la loi, visent à prévenir et à réduire les dangers et les nuisances liés aux installations afin de protéger les personnes, l’environnement et la santé publique.
Il s’agit notamment de la surveillance des installations classées : visites d’inspection, examen des rapports remis par des organismes vérificateurs externes, analyse des procédures de fonctionnement et d’études remises par l’exploitant …
Les services de l’inspection du travail, rattachés aux DIRECCTE, ont développé depuis l’année 2019 des actions de contrôle des établissements SEVESO seuil haut, seuil bas et des ICPE soumises à autorisation en orientant les interventions de l’inspection du travail vers les questions de sécurité des travailleurs intervenant sur des sites classés ICPE.
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