26 juillet 2023 Publication

Les conséquences de la réforme de l'assurance chômage de 2021 sur la satisfaction des besoins en main d’œuvre des secteurs agricole et agroalimentaire

  • Bruno Gadoud
  • Jean-Marie Marx

Le CGAAER a été chargé d’appréhender les conséquences de la réforme de l'assurance chômage entrée en vigueur 2021 sur la satisfaction des besoins en main d’œuvre des secteurs agricole et agroalimentaire.

Pascal Xicluna/agriculture.gouv.fr

Rapport de mission de conseil n°22043

Décembre 2022

Enjeux

Les secteurs agricoles et agroalimentaires sont confrontés à d’importants besoins de main d’œuvre qui portent pour beaucoup sur le travail saisonnier et les contrats courts. La forte saisonnalité de certaines productions agricoles (arboriculture, viticulture, maraîchage) mais aussi de certaines habitudes de consommation (période estivale, fêtes de fin d’année) explique le niveau élevé de ces recrutements.

Les difficultés récurrentes de recrutement, traduites dans des indicateurs de tension, y sont très marquantes avec au moins 50 % de recrutements jugés difficiles par les employeurs. Elles sont en particulier dues au manque d’attractivité de ces secteurs, à une faible fidélisation des salariés et à leur forte mobilité vers d’autres secteurs, ainsi qu’à la concentration géographique des besoins dans certains bassins ruraux avec un faible taux de chômage. Enfin, de longue date, ces secteurs recourent à une main d’œuvre internationale.

Les conséquences de la réforme de l’assurance chômage, engagée en décembre 2021, affectent potentiellement ces recrutements :
- par la recherche par les salariés de contrats de travail d’une durée plus longue ;
- par l’incitation des employeurs à réduire notablement le recours à de nombreux contrats de courte durée.

Le CGAAER a été chargé d’étudier l’impact de cette réforme.

Méthodologie

Après une revue bibliographique et réglementaire, la mission a consulté les principaux acteurs de l’emploi agricole et agroalimentaire, pouvoirs publics, organismes compétents, représentants des employeurs et des salariés.

Une phase de terrain a permis d’enrichir cette première approche. Les missionnés ont réalisé des entretiens avec des acteurs de l’emploi dans quatre régions permettant d’illustrer la diversité des productions agricoles et des industries agroalimentaires dans leurs territoires.

Résumé

Malgré le manque de recul sur les conséquences de la réforme de l’assurance chômage (introduction du bonus/malus sur le taux de cotisation pour les entreprises agroalimentaires de plus de 11 salariés, conditions d’affiliation plus restrictives pour les demandeurs d’emploi et réduction du montant de l’allocation de retour à l’emploi avec allongement de la durée de versement), la mission a détecté des impacts potentiels sur l’accès à la main d’œuvre et plus généralement sur l’attractivité du secteur.

Pour en limiter les effets, des pratiques et solutions multiples ont été identifiées. Elles visent soit les salariés et les demandeurs d’emploi, soit les employeurs et leurs branches professionnelles. Elles portent notamment sur le « sourcing » des salariés, sur la levée de freins sociaux (logement, transport, horaires…), sur l’organisation du travail (meilleur équilibre entre vie professionnelle et personnelle), sur la combinaison des activités et des contrats, sur la formation… Elles sont mises en œuvre par les employeurs individuels, par des organisations collectives (via les organisations professionnelles, les groupements d’employeurs, l’Association nationale pour l’emploi et la formation en agriculture, …), par l’externalisation (entreprises de travaux agricoles) et par des tiers employeurs (entreprises de travail temporaire). La mission recommande que la négociation collective soit renforcée dans ces domaines et que la gestion globale de la ressource humaine soit accompagnée et soutenue.

En outre, la tension sur les recrutements entraîne des baisses de production et accélère l’évolution des systèmes de production et de transformation vers davantage de mécanisation, de robotisation et de digitalisation. La réduction de la main d’œuvre saisonnière de courte durée et peu qualifiée au profit d’une main d’œuvre plus qualifiée constitue donc une perspective intéressante. La mission recommande d’accompagner par la formation cette évolution déjà en cours.

Enfin, l’objectif de sécurisation de la main d’œuvre des secteurs agricole et agroalimentaire, soutenu par les ministères chargés de l'agriculture et du travail, doit être mis en œuvre dans les territoires. Les Régions, compétentes en matière de développement économique, de formation, d’orientation et désormais d’installation en agriculture, peuvent porter avec les services de l’État cette ingénierie sociale et la décliner dans les territoires.

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