Le statut des chiens de protection des troupeaux
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Est-il nécessaire de modifier le droit pour répondre au sentiment d’insécurité juridique ressenti par les éleveurs de chiens de protection des troupeaux ou les bergers utilisateurs ? Telle était la mission confiée au CGAAER.
Rapport de mission de conseil n°23029
Juillet 2023
Enjeux
La France a mis en place des mesures d’accompagnement visant à permettre l’équilibre entre la préservation des espèces protégées telles que le loup et le maintien d’une activité d’élevage. L’utilisation de chiens de protection des troupeaux est un dispositif à l’efficacité reconnue. Elle entraîne toutefois fréquemment des problèmes de cohabitation avec les autres usagers des zones d’élevages ou leurs riverains. Ces difficultés peuvent ainsi placer les utilisateurs de ces chiens dans une situation d’insécurité juridique préjudiciable au développement de la technique.
Le CGAAER a été chargé de recenser les règles applicables à l’utilisation des chiens de protection des troupeaux et évaluer les éventuelles évolutions de la règlementation ou des pratiques qui s’avèreraient nécessaires.
Méthodologie
De Mars à juillet 2023, la mission a entendu des acteurs de la filière et les organisations professionnelles agricoles et les différentes structures administratives impliquées.
Elle s’est par ailleurs appuyée sur les rapports de parlementaires et des missions antérieures du CGAAER.
Elle a analysé la situation des utilisateurs des chiens de protection de troupeaux, les règles juridiques applicables à l’engagement de leur responsabilité civile et pénale, ainsi que l’exercice
de leur pouvoir de police des maires pour encadrer l’utilisation de tels chiens. Elle a ensuite étudié la pertinence d’y apporter des ajustements ou des modifications.
Résumé
Les éleveurs, les détenteurs et les utilisateurs de chiens de protection des troupeaux sont soumis à un ensemble de dispositions juridiques précises. La mission a pu constater que les différents acteurs maîtrisaient correctement les règles applicables.
Cependant, la question du risque d’engagement de la responsabilité civile et surtout pénale, pour les dommages causés aux tiers par les chiens de protection des troupeaux, est régulièrement posée. Elle a même suscité une réflexion sur l’élaboration d’un statut des chiens de travail et sur l’exclusion de la responsabilité des éleveurs et bergers pour les agressions commises par leurs chiens. Toutefois, cette voie semble complexe et hasardeuse juridiquement, en sus d’être inefficace, pour répondre aux réelles préoccupations des utilisateurs de chiens de protection des troupeaux.
Deux règles juridiques soulèvent des problèmes pratiques réels.
D’une part, la règlementation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement est perçue comme particulièrement inadaptée par les éleveurs, détenteurs et utilisateurs de chiens, et renforce leur sentiment d’insécurité juridique. Son évolution doit être envisagée.
D’autre part, les nuisances sonores liées aux aboiements cristallisent les tensions sur le terrain et peuvent conduire à décourager les éleveurs. Sur ce sujet, les actions visant à améliorer le travail des chiens et les efforts de communication, de sensibilisation et d’éducation à leur action sont les clés d’une meilleure cohabitation plus sereine entre l’élevage et les autres activités dans les zones concernées et les acteurs concernés. Une culture de la médiation doit s’imposer en la matière.
De manière générale, la structuration et l’organisation de la filière sont indispensables pour limiter les risques juridiques et pour renforcer l’acceptabilité de cette technique de protection contre la prédation. Les travaux menés par l’Institut de l’élevage et La Pastorale pyrénéenne sont reconnus et constituent une première étape importante vers la constitution d’une véritable filière. Ils doivent être approfondis et soutenus par l’État à qui il revient d’agir en veillant à la cohérence des actions et en incitant les éleveurs à s’inscrire dans cette démarche de filière.