La résistance aux produits phytopharmaceutiques
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Christophe Délye, chargé de recherche à l'UMR 1347 de l'INRA à Dijon, et Annie Micoud, responsable de l'Unité Résistance aux Produits Phytosanitaires du laboratoire de l'ANSES à Lyon, ont présenté à la section « Alimentation et santé » du CGAAER un exposé sur le phénomène de résistance des bio-agresseurs (ravageur, agent pathogène, adventice…) aux produits phytopharmaceutiques (PPP). L’enjeu est majeur. Peu de substances ayant des modes d’action nouveaux seront commercialisées dans la décennie à venir, alors que des substances anciennes, devenues inefficaces, sont régulièrement retirées du marché.
La résistance d'un bio-agresseur aux produits phytopharmaceutiques (PPP) se caractérise par deux facteurs : l’intensité et le spectre. L'intensité de la résistance est le rapport entre la quantité de PPP requise pour avoir le même effet sur un individu résistant que sur un individu sensible. Le spectre de la résistance est la gamme de substances auquel un bio-agresseur sera résistant. Le caractère de résistance est génétiquement transmissible d'une génération de bio-agresseurs à une autre, car il est déterminé par une ou plusieurs modifications du génome.
On distingue globalement deux types de résistances, selon la nature du mécanisme en cause :
- la résistance liée à la cible du PPP (ex : dans le cas d'un produit larvicide, le gène codant le neurotransmetteur cible du PPP a muté, rendant la larve insensible au produit) ;
- la résistance non liée à la cible et qui fait intervenir d’autres mécanismes comme la métabolisation (l'organisme cible acquiert la capacité à métaboliser le PPP et donc à le neutraliser), la séquestration (ex : la cuticule de l'insecte ravageur qui acquiert la capacité de réduire la pénétration du PPP dans son organisme) ou l’afflux accru du PPP au travers des stomates foliaires qui réduit l'exposition du bio-agresseur au PPP.
Sous l’effet des applications de PPP, la fréquence des bio-agresseurs résistants augmente dans les populations, jusqu’à causer éventuellement une perte de contrôle. L’enjeu des stratégies anti-résistances est donc de ralentir la sélection d'individus résistants par de nouveaux PPP.
Les interventions ont été émaillées de conseils pratiques :
« l’idée est de traiter le plus tôt possible et le plus fort possible » ;
« il faut aussi veiller à la diversité dans les rotations, à varier les modes d’actions, les matières actives et éviter les faux mélanges de produits ayant le même mode d'action qui ne font qu’augmenter le risque » ;
« Une gestion concertée du désherbage avec ses voisins est souhaitable car la résistance se propage aussi par les airs ».