La gestion des petites forêts privées
Partager la page
Le CGAAER a été chargé d'étudier les moyens de dynamiser la gestion des petites forêts privées qui représentent un tiers de la surface de la forêt française et sont en grande majorité délaissées par leurs propriétaires.
Pascal Xicluna / agriculture.gouv.fr Rapport de mission de conseil n° 18127
Décembre 2019
Mots-clés : forêt privée, gestion forestière, reboisement, propriétaire forestier, groupement forestier, coopérative forestière
Enjeux
Le morcellement des forêts françaises privées de 1 à 25 hectares rend très difficile leur exploitation. Ces petites propriétés représentent 5 millions d'ha, soit 33 % de la forêt française, et concernent un million de propriétaires.
Le taux d’exploitation n’y est que de 25 % du croît biologique. Faire évoluer ce taux est indispensable à l’atteinte des objectifs du Programme national forêt bois (PNFB). À eux seuls les 370 000 propriétaires de 4 à 25 ha (20 % de la forêt française) pourraient assurer théoriquement 60 % des 12 millions de m3 supplémentaires prévus par le PNFB pour 2025.
Cela peut se faire sans inconvénients pour les multiples fonctions écologiques des forêts, en raison des compétences des professionnels et de la diversité des forêts françaises. Les enjeux « carbone » et d'adaptation au changement climatique, tout aussi cruciaux que l'enjeu économique rendent nécessaire une intervention publique. Le CGAAER a été chargé de concevoir des propositions susceptibles de concilier une gestion forestière dynamique tout en préservant les multiples fonctions de la forêt, notamment la protection de la biodiversité et l'adaptation au changement climatique pour lesquelles la diversité des modes de gestion est un atout indéniable.
Méthodologie
Pour réaliser une analyse approfondie des différents dispositifs de regroupement de la gestion forestière en vigueur, la mission a rencontré les acteurs de la gestion forestière publique et privée dans trois grandes régions (Auvergne-Rhône Alpes, Nouvelle-Aquitaine, Grand-Est) : les représentants des syndicats de propriétaires forestiers, des interprofessions et des coopératives concernés, des experts et des exploitants forestiers, des agents de l’ONF, du CNPF et des CRPF (Centre régional de la propriété forestière) et CA et de PEFC, des élus des communes forestières et des agents de la FNCOFOR.
Une comparaison avec la gestion de la petite forêt privée en Allemagne a été également réalisée.
Résumé
Constats et recommandations
L’analyse des dispositifs actuels de regroupement de la gestion forestière montre qu’ils reposent sur « l’animation », c’est-à-dire la connaissance, la mise en relation, l’information, la formation et l’offre de services adaptés et complets aux propriétaires. Leur impact est toutefois restreint.
Actant du constat partagé par tous les acteurs de la filière forêt bois que seule une nouvelle approche serait de nature à faciliter le regroupement de la gestion forestière, la mission a proposé un dispositif d'incitation et de soutien totalement nouveau.
Reposant sur un accompagnement humain, technique et financier, proposé sur une base volontaire aux propriétés de 1 à 10 ha, ce dispositif est structuré en trois groupes de mesures :
- Faciliter l’action des acteurs publics et des professionnels privés dans leurs contacts avec les petits propriétaires ;
- Mettre fin à la réticence des petits propriétaires privés à s’engager dans une gestion dynamique et consolider cet engagement sur du long terme ;
- Orienter les petits propriétaires vers des actions positives de regroupement foncier et faciliter l’intervention des communes.
Afin d'inciter à la gestion forestière, la mission propose une nouvelle contribution, de type CVO, qui serait versée annuellement par les propriétaires de plus de 1 ha sur une commune et qui ne se sont pas engagés dans la mise en œuvre d'un document de gestion approuvé. Cette contribution serait gérée par l’interprofession forêt-bois. On attend de cette dépense récurrente significative pour les petits propriétaires ayant délaissé leur forêt une forte incitation à sortir de l'inaction.
Le coût des mesures d'accompagnement proposées (modeste au regard des valeurs économiques et sociales d’une mobilisation accrue des bois de petits forêts privées pour beaucoup de territoires ruraux) serait entièrement couvert par les recettes de cette nouvelle CVO.
Par ailleurs, la mission considère que le rôle des communes forestières, d’ores et déjà important dans la gestion foncière et l’animation avec des effets d’entraînement des petits propriétaires privés dans une gestion dynamique, doit être renforcé.
Afin de s’entourer des meilleures garanties sur la régénération de la ressource, la mission prévoit notamment la généralisation du document de gestion durable simplifié et géo-référencé dès le seuil de 10 ha (dès 4 ha sur une base volontaire) et l’encouragement de l’adhésion des propriétaires et des exploitants forestiers aux schémas existants de certification forestière (PEFC et FSC). Le contrôle des coupes, ciblé grâce à la télédétection, sera renforcé.
La mise en œuvre de l’ensemble de ces mesures permettrait à horizon de 10 ans un accroissement de récolte annuelle commercialisée de 5 millions de m3 rien qu'en forêt privée de moins de 25 ha, soit 40 % de l’objectif de 12 millions de m3 retenu par le PNFB.