26 janvier 2016 Publication

Conditions requises pour la certification phytosanitaire à l’exportation des grumes

  • Catherine de Menthière

Le CGAAER a été chargé d’examiner les différents procédés permettant de satisfaire aux obligations sanitaires en matière d'exportation de grumes de bois dans un contexte d'activité à l'export très importante…

Chargement des grumes non écorcées et non traitées en forêt, dans des conteneurs maritimes pour l'exportation - ©JM Thomas

Rapport de mission de conseil n°15116 CGAAER

Novembre 2015

Mots clés : certification phytosanitaire, exportation des grumes

Enjeux

Les grumes font l'objet d'un commerce grandissant au niveau mondial. L'Union européenne et particulièrement la France sont devenues des fournisseurs importants. Environ 40 % de la production française de grumes de chêne sont exportés.

Pour être exportées, les grumes doivent satisfaire à des obligations sanitaires (absence de parasites) à la demande de certains pays destinataires, principalement la Chine. Ce traitement est attesté par les autorités en charge de la certification phytosanitaire pour l'exportation (DRAAF).

Suite au rapport du CGAAER

de juin 2014, des contrôles des conditions réelles de traitement des grumes ont conduit l’ANSES à réaliser une nouvelle évaluation des risques. Un second rapport a été demandé au CGAAER pour examiner les conditions applicables depuis plus de 6 mois.

Méthodologie

La mission, qui devait rendre ses conclusions dans un délai très court, a procédé par des échanges avec les représentants des pouvoirs publics concernés et des professionnels du secteur en France et dans quatre autres pays européens : l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Espagne et la Belgique.

Résumé

Les conditions requises pour la certification phytosanitaire des grumes sont à tort réduites aux seuls traitements chimiques. D’où un raccourci simpliste : pas de traitement chimique, pas d’exportations. Or le volume commercialisé de produits phytosanitaires destinés au traitement des grumes exportées est beaucoup plus bas que celui correspondant aux volumes de grumes effectivement exportées après traitement chimique (facteur d’au moins 1 à 10). Il est donc important de mieux faire connaître et appliquer les dispositifs phytosanitaires.

Dans les faits, les exigences pour la certification sanitaire résultent des demandes du pays importateur (hors Union européenne) et des règles nationales au regard de la sauvegarde de la santé de la population, de l’environnement et de la qualité des eaux. L’ANSES délivre les autorisations de mise en marché des produits phytopharmaceutiques après une expertise collective réalisée sur la base des éléments fournis, pour un usage donné, par le fabricant.

La mission a examiné les différents procédés d’élimination des parasites.

En premier lieu l’écorçage des grumes, bénéfique à la santé, à l’environnement, permettant des contrôles effectifs et concourant à la collecte d’écorces pour les énergies renouvelables, est encore insuffisamment utilisé.

En second lieu, le rapport précise les conditions d’utilisation du seul produit chimique autorisé par l’ANSES, le « Profume » (fluorure de sulfuryle). L’emploi de ce gaz inodore, mortel par inhalation, est très encadré. Son usage dans des conteneurs maritimes ou sous bâche est interdit en France, en raison d’un risque inacceptable pour les opérateurs et les personnes présentes lors du traitement. L’utilisation du Profume, pour les bois abattus, ne peut se faire que dans des installations autorisées par le ministère de l’agriculture et visées à l’article 9 de l’arrêté du 4 août 1986 (Cf. décision ANSES du 12 décembre 2015, relative à la demande d’autorisation de mise en marché du Profume).

En troisième lieu, d’autres procédés efficaces d’élimination des parasites, officiellement approuvés peuvent être envisagés (traitement thermique, trempage…).

Les coûts évoqués par les opérateurs pour ces deux premiers modes opératoires (écorçage et fumigation) ne peuvent être comparés aux coûts des pratiques actuelles qui comportent des traitements « allégés » ou non sécurisés, comme l'a dénoncé l’ANSES.

Les modes opératoires sont connus de longue date : les exigences sanitaires chinoises en matière d'importation de grumes n'ont pas varié depuis 2001 et la fumigation au Profume, introduite dans l'arrêté de 1986, est décrite par l’arrêté de 2006. Le report de l’application des règles qui s’imposent aujourd’hui ne peut donc se justifier par une méconnaissance de celles-ci.

Les exportateurs français ont disposé jusqu'à ce jour d’un avantage concurrentiel certain, ce qui a favorisé l’exportation des grumes à des niveaux considérables.

Les dispositions en vigueur en Belgique, Allemagne, Pays-Bas et Espagne sont très variables. La mission recommande une harmonisation au sein de l’Union européenne des conditions d’emploi, des pratiques et des contrôles pour éviter des effets d’opportunisme. Le protocole de Montréal, entré en vigueur en 1989, vise à la cessation progressive de la production et de la consommation de substances appauvrissant la couche d’ozone (Profume) et a conduit à l’interdiction de bromure de méthyle en 2010.

La certification phytosanitaire est un sujet complexe pour lequel les aspects de santé humaine, d’environnement et d’économie devraient être tout autant considérés que les questions d'intérêts financiers immédiats pour un propriétaire privé, une coopérative forestière, un négociant ou encore un prestataire de services. Changement de pratique et innovation devraient permettre de concilier l’intérêt général et l’intérêt privé.

Lien vers le rapport


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