Comment améliorer l'utilité et l'efficacité de l'action territoriale de l'État dans les domaines de l'agriculture, l'alimentation et la forêt ?
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Le CGAAER a été chargé d'analyser le fonctionnement et l’organisation des services de l’État en région dans la mise en œuvre des politiques publiques portées par le ministère après les réformes qui se sont succédées depuis 2009.
Rapport de mission de conseil n°21037
Mars 2022
Enjeux
Les services de l’État en région ont fait l’objet de nombreuses réformes depuis 2009.
Une mission du CGAAER a été chargée d'analyser leur fonctionnement et leur organisation dans la mise en œuvre des politiques publiques portées par le ministère chargé de l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
Elle a également étudié les relations des services régionaux (DRAAF) et départementaux (DDT, DDPP) avec les autres acteurs de ces politiques publiques, et notamment les établissements publics opérateurs de l’État.
Méthodologie
La mission a procédé par entretiens avec de nombreux acteurs nationaux et dans les territoires. Elle a fait une analyse des études existantes, rapports et divers documents d’actualité portant sur les missions et politiques publiques en lien avec celles du ministère.
La singularité de cette mission réside dans une revue systématique des activités des agents, à partir des données des systèmes d’information et d’une analyse collective et participative associant notamment les groupements des directeurs régionaux et départementaux ainsi que l’administration centrale (secrétariat général), ASP, FAM, ONF, CNPF et le réseau des Chambres d’agriculture.
Résumé
Depuis dix ans des réformes organisationnelles se succèdent souvent mal préparées, ces réformes sont très consommatrices en énergie et tardent à produire les effets escomptés. Responsables du ministère et agents attendent une stabilité organisationnelle ou, pour le moins, une démonstration de la nécessité de changer.
Les liens entre les politiques publiques, les missions confiées aux structures et l’activité des agents semblent s’affaiblir et génèrent une « perte de sens » qui nuit à la motivation, au bien-être au travail, au management et à la performance publique. Les priorités politiques du moment viennent se superposer aux tâches du quotidien et imposent aux services déconcentrés d’arbitrer localement leurs actions.
Le sens de l’action de l’administration souffre gravement de la multiplication de « plans », rarement évalués, qui relèvent davantage « d’opportunités » politiques que de véritables programmes de transformation publique ou d’accompagnement de l’agriculture dans la durée. Trop peu d’efforts visent à mettre en cohérence les politiques publiques entre elles, à adapter les ressources aux priorités en intégrant un critère territorial modérateur ou accélérateur, et à évaluer la performance des actions et leviers mobilisés.
La légitimité d’un ministère technique comme le ministère chargé de l’agriculture repose sur des compétences spécifiques (agriculture, alimentation, forêt…) dont plusieurs tendent à disparaitre. Ces compétences sont précieuses et particulièrement appréciées des préfets. Toutefois, elles exigent à la fois une gestion prévisionnelle et un management adapté afin de les rendre disponibles au plus près des territoires et des projets. La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences est une question clé de l’organisation à venir du ministère et de son attractivité et doit être réinvestie à tous les niveaux.
La plupart des enjeux sont territoriaux et le ministère gagnerait à adapter ses politiques publiques, trop rarement co-construites avec les territoires. Le management est insuffisamment assis sur une délégation de responsabilités claires au niveau territorial, notamment du fait des établissements publics nationaux qui ne font pas tous l’effort d’organiser la concertation interservices. Cela appelle un travail plus fin sur leur pilotage (FAM, Chambres d’agriculture notamment).
Le ministère et ses services déconcentrés doivent répondre de manière opérationnelle à des enjeux de plus en plus interministériels. Plusieurs directions régionales, opérateurs et directions départementales y concourant, la désignation de chefs de files identifiés et légitimes permettrait de gagner en cohérence tout en respectant la diversité des expressions ministérielles.
Les entretiens réalisés et l’analyse du fonctionnement des établissements publics ont révélé des marges de manœuvre d’autant que des activités essentielles sont aujourd’hui orphelines ou mal dimensionnées.
La mission propose de stabiliser les organisations et de revoir en profondeur leur fonctionnement, en articulation avec les opérateurs et l’enseignement agricole. Le ministère doit établir et hiérarchiser ses priorités de manière univoque, lisible et en donnant une marge de manœuvre aux services déconcentrés pour les décliner.
Elle préconise une plus grande territorialisation des politiques publiques portées par le ministère, traduite dans des feuilles de routes en réponse aux priorités du ministre et construites depuis le niveau départemental et régional, étendues aux établissements publics et validées par le préfet de région.
En département, il conviendrait de développer une approche intégrée de l’alimentation au sein des DD(ETS)PP et de conforter les DDT(M)-Direction départementale des territoires et de la mer comme porteur des transformations territoriales et systémiques de l’agriculture.
Pour chaque opérateur (ASP, FAM, Chambres d’agriculture, ONF et CNPF), la mission propose deux orientations possibles, l’une conférant aux établissements une plus grande autonomie, l’autre renforçant l’intégration de leurs services territoriaux en régions ou en départements, sous le contrôle des préfets, en tant que délégués territoriaux.
Dans tous les cas, la mission recommande de co-construire les prochaines transformations avec les acteurs eux-mêmes et leurs réseaux organisés.